D’une manière ou d’une autre, tous les Algériens qui ont un lien
d’ancrage avec la terre y sont retournés ces dernières années. Et de
quelle manière ! Il faut voir avec quel enthousiasme, quelle
détermination et surtout quel… bonheur ils s’y sont mis, ou remis, pour
comprendre que quelque chose est en train de se passer. On connaît le
rapport de l’homme à la terre, il est naturel, vital et parfois charnel.
Mais cette relation n’explique pas tout, dans le cas précis qui est le
nôtre, du moins. Pendant de longues décennies, ce lien a été rompu par
des choix qui étaient autant d’errements ayant abandonné le sol parce
qu’il y avait un sous-sol, pas forcément plus généreux mais certainement
plus commode en ce qu’il requiert moins d’efforts. On sait les
frustrations que cela a engendrées mais on sait surtout le résultat dans
nos étals, nos étables et nos silos. Parmi les Algériens qui ont renoué
avec l’odeur de la terre, on compte d’abord ceux qui ont retrouvé leurs…
propriétés qu’ils ont observé, impuissants dans la jachère, le bricolage
ou la spéculation. Ceux-là en ont fait une question d’honneur :
refleurir le verger ou redorer l’épi est une vocation qui ne se perd
pas, surtout quand ce n’est pas seulement de vocation qu’il s’agit. Ils
ont alors redémarré le matos, ce qui ne veut pas dire que les conditions
du retour aux sillons étaient enfin là. Pire, à la périphérie de leur
investissement — au sens plein du terme — poussait déjà une… faune de
prédateurs qui s’accaparaient de grandes étendues sans jamais penser à
en faire un jour des espaces de fécondité. Il y a ceux qui n’ont jamais
vécu de leur lopin et ont même fini par l’abandonner. « Exilés » pour
gagner leur vie autrement, ils ont même fini par renoncer au plaisir d’y
toucher, tellement les temps sont durs et les priorités d’une autre
nature. Il faut voir aujourd’hui comment ils s’y donnent et ce qu’ils en
obtiennent pour tout comprendre. Il y a enfin les compétences
scientifiques des métiers de la terre qui ont enfin la possibilité de
faire... ce qu'ils savent faire le mieux et, suprême bonheur, d’en
vivre. Ils sont techniciens, ingénieurs, vétérinaires, cadres
gestionnaires ou passionnés auto-formés, ils ont acquis ou repris de
petites ou moyennes exploitations pleines de promesses sur l’avenir de
l’agriculture dans notre vaste et beau pays. Ils y travaillent avec les
moyens et les méthodes les plus modernes, mettent de l’ambition dans
leur projet et renouent parfois avec des produits et pratiques du
terroir qu’on croyait irrémédiablement perdus. Les résultats sont
nettement visibles même s’il reste beaucoup de travail… Redonner encore
la terre à ceux qui veulent et savent la travailler, retrouver de vraies
banques, assurer l’eau... travailler la terre, quoi.
S. L.
S. L.