Un paquet d’enseignements pour les débuts de Vladimir Petkovic. Deux principaux chantiers à mener, des promesses, des déceptions et beaucoup de travail à accomplir. En juin, les Verts sauront s’ils sont encore capables d’aller de l’avant.
Fin du premier stage de l’EN algérienne version Petkovic. Un second match aussi mouvementé que le premier, vendredi passé contre la Bolivie. C’est vrai que cette fois l’adversaire nous est connu. Les Bafana Bafana, troisièmes lors du récent tournoi africain, sont venus pour confirmer leur élan. Malgré des absences notables, Hugo Broos et son équipe ont été sobres. Très remuants et à l’efficacité retrouvée contrairement à leur match inaugural face à Andorre.
Devant l’Algérie, ils ont donné coup pour coup parvenant à créer la zizanie dans le camp algérien. Petkovic, qui n’a eu que six séances d’entraînement et deux rencontres pas trop amicales, a vu et a constaté. A-t-il diagnostiqué parfaitement le mal qui rongeait les Verts ? Pas si vite de lui prêter cette faculté de découvrir les «pannes» au sein d’une mécanique qui fabriquait des résultats à longueur d’année mais qui se rouillait à l’occasion de compétitions majeures. Vladimir Petkovic, puisqu’on aime évoquer juste le rôle de l’entraîneur en chef en omettant celui de ses collaborateurs et des joueurs qui font l’effort de s’appliquer sur le terrain, a fait deux constats.
A l’issue du premier match de ce tournoi, il a évoqué un mental affaibli dès lors que l’équipe encaisse des buts ou fait face à un adversaire coriace qui ose prendre l’initiative. Mardi soir, il a mis à nu les erreurs défensives en prenant soin de ne pas charger spécialement et exclusivement les éléments de la défense préférant parler d’une faillite du bloc. Petkovic a aimé, par contre, la qualité de certains joueurs en citant Benzia, auteur d’une prestation XXXL et d’un but d’anthologie. Benzia mis à part, l’EN algérienne a misé sur l’individuel même si, pour une première, le collectif a paru plus compact, plus engagé. Le nouveau sélectionneur semble avoir tout compris, par ailleurs, sur le fonctionnement du football en Algérie. Sans lui prêter (encore une fois) l’intention de faire une passe aveugle à la Belloumi, il a shooté le choix de certains éléments pour le stage de mars. Des 31 joueurs retenus, plus l’invité de dernière minute, Zorgane, mais moins Boudaoui et Bennacer (blessés), Petkovic n’a essayé que 24 capés. Benbot, Belaid, Abdelli, Belloumi, Guitane et Bouanani n’ont pris part à aucune minute dans les deux confrontations. Dans sa réponse, à l’issue du match de mardi, l’ancien driver de la Lazio a demandé à ses joueurs de travailler plus en clubs. Et de convenir qu’il lui sera difficile d’arrêter sa liste des 23 pour le mois de juin. Cela veut-il dire qu’il n’effectuera pas d’autres essayages lors de la prochaine date Fifa qui verra la sélection disputer deux rencontres officielles face à l’Ouganda et à la Guinée comptant pour les qualifications au Mondial ? S’il n’a pas fermé définitivement la porte aux Mahrez, Slimani, Belaïli et autres, et comptant sur le retour des blessés Bennacer, Bensebaïni et Boudaoui ainsi que le dispensé Gouiri, il y aura forcément des choix forts à faire.
La défense, un chantier à part ?
Outre le choix des hommes, Petkovic doit faire des choix d’axes de chantier à mener en un laps de temps très court. Mentalement, le groupe semble être débarrassé de ses peurs. Lors de ce tournoi, et à chaque fois qu’il est mené, il a su remonter la pente. Bien sûr, tout n’est pas parfait à ce niveau. La concentration dans les zones de vérités, défensive et offensive, est à améliorer. Un match officiel requiert beaucoup plus de tension nerveuse qu’un test d’application où il est surtout question de mise en place. Face à deux adversaires, surtout deux styles de football, les camarades de Mandi ont fait dans la réaction après avoir pensé faire dans l’action. Ils ouvrent le score, monopolisent le cuir puis sombrent avant de renaître brutalement. a-t-il un secret au réveil brutal sinon les changements de pions et le replacement du bloc effectués par le néo-sélectionneur. L’apport du sang neuf durant la deuxième moitié des matches contre la Bolivie et l’Afrique du Sud a eu son effet. L’entrée de Bakrar et Kendouci, la sortie de Brahimi et la redistribution des rôles au milieu du terrain et en attaque ont été les principales actions commises par Vladimir Petkovic et ses proches collaborateurs. La bonne lecture du jeu de l’adversaire et de son équipe aura permis un dénouement moins dramatique que prévu pour un ensemble qui doit attaquer en bloc et défendre dans le même ordre d’idées. Si bien que ceux qui pensent que le problème de la sélection est seulement lié à la composante de l’arrière-garde ont fini par être recadrés par Petkovic qui invoque des erreurs défensives dans un cadre global. «Sur l'aspect défensif, il faudra encore travailler, tout le monde doit être concerné», notera-t-il en fin de match contre les Bafana Bafana. Certes Mandi a fauté, Madani a fauté et Tougaï a fauté. Mais sur les cinq buts encaissés, Brahimi, promu meneur de jeu, a également fauté en n’étant pas assez vigilant quand il s’est fait chiper le cuir sur l’égalisation des Sud-Africains. Le capitaine des Verts a commis une faute qu’il partage avec tout le bloc médian qui devait être en soutien sur cette action qui a vu les Sud-Africains faire le siège autour des 30 mètres algériens. Pour dire que le vrai problème est systémique.
Individuellement parlant, ce tournoi a révélé le retour en grâce de Yassine Benzia. Mais également le centre-avant de New York City FC, Monsef Bakrar. Sans avoir marqué mais auteur de trois passes décisives, l’ancien attaquant du Dynamo Zagreb a fait valoir son sens de combativité, une certaine finesse et ses déplacements sur le front de l’attaque. C’est un peu le dynamisme de Bounedjah en plus puissant. Elément à revoir, Bakrar doit encore travailler sa finition… Un aspect que Benzia a fini par soigner depuis qu’il a rejoint l’Azerbaïdjan.
Benzia émerge, Bakrar à revoir
A nouveau sélectionné, après cinq ans de traversée de désert, l’ancien lyonnais a flambé en trois mi-temps. Auteur de trois buts inscrits dans des postures différentes et d’une passe décisive, le sociétaire de Qarabag a étalé le grand art, si bien que beaucoup ont conclu que Benzia était l’une des victimes du système Belmadi. En fait, depuis sa première sélection, l’ancien lillois n’a fait que 4 apparitions dont deux sous les ordres de l’ex-sélectionneur. C’était en 2018 et depuis le joueur promis à une grande carrière professionnelle n’a plus été convoqué. Ce qui ne signifie nullement qu’il n’était pas dans les petits papiers de Belmadi. Benzia, talent comparé à Zidane puis à Benzema, a passé quelques années d’instabilité à se chercher dans des championnats de seconde zone (Turquie, Grèce et désormais en Azerbaïdjan) alors que tout le monde espérait le voir briller en Angleterre, Espagne ou en Italie. Cinq années de vadrouille marquées par un faible rendement (67 matches, 8 buts). A Qarabag, Benzia (29 ans) a retrouvé une seconde jeunesse, celle menée chez l’Olympique lyonnais puis à Lille. En 41 matches joués cette saison (toutes compétitions confondues), il a inscrit 13 buts et délivré 10 passes décisives. Ses deux nouvelles capes qui portent le nombre de sélections à 6 matches, lui ont permis d’inscrire autant de buts que lors des 4 premières apparitions sous le maillot vert entre 2016 et 2018.
Belmadi qui avait à choisir entre plusieurs joueurs au même profil avait-il raison de ne pas accorder de nouvelles chances à Benzia alors que des éléments sans club et d’autres en méforme ont été régulièrement sélectionnés ? Si la réponse à cette question ne peut être donnée que par les principaux concernés, la réalité donne raison à Belmadi qui a remporté une CAN sans Benzia et son team a inscrit 141 buts en 65 matches. Si bien que le joueur lui-même n’était plus «intéressé» de poursuivre sa carrière professionnelle après son grave accident de buggy en mai 2020 quand il évoluait à Dijon. Son retour sur les terrains allait être une longue bataille faite de sacrifices en vue de retrouver une certaines brillance. Et de provoquer l’intérêt des clubs et chez les sélectionneurs. Or, depuis 2021, Benzia a multiplié les choix par défaut en allant jouer en Turquie (Hatayspor) puis en Azerbaïdjan (Qarabag FK). D’ailleurs, c’est en retrouvant une certaine sérénité et le chemin des filets au sein du club azéri que l’international algérien finit par «cligner» à Belmadi. Depuis, une page s’est tournée…
M. B.
Vladimir Petkovic (sélectionneur de l’Algérie) :
«On va tirer les enseignements nécessaires»
«Je suis très content de la manière dont le stage s'est terminé. On a eu des blessés, mais l'équipe a montré qu'elle est prête à faire de belles choses. En tant que staff, on se met à la disposition des joueurs même dans les périodes où on n'est pas en stage avec l'équipe. Durant ce stage, nous avons commis des erreurs que nous ne pourrons pas commettre en juin. On doit faire une analyse sur ce stage qui est bénéfique pour moi. On va faire le bilan et bien évidemment chercher à voir d'autres joueurs à l'avenir pour solidifier notre équipe. Nous avons encaissé certes cinq buts en deux matchs, mais la plupart ont été marqués sur des erreurs défensives et des erreurs de concentration. Il faut être conscient de cela et corriger pendant le match et après. L'Afrique du sud est une équipe remarquable avec un collectif bien rodé. Je pense qu'on tirera des renseignements de cette belle rencontre. Je savais dès le début qu'on avait un potentiel offensif très intéressant. Le travail que nous avons cherché de faire, c'est de donner l’équilibre à l'équipe. Sur l'aspect défensif, il faudra encore travailler, tout le monde doit être concerné. Le plus important pour nous c'est notre façon de jouer sur le terrain, je ne regarde pas trop l'adversaire. Certes, on doit bien connaître l'adversaire, mais ce n'est pas ça qui va changer notre vision sur le football. J'ai un large choix, dommage que je n'ai pas eu l'occasion de donner à tout le monde une chance de jouer. Ce sera difficile de choisir 23 joueurs pour le mois de juin, tellement il y a beaucoup de bons joueurs. Concernant Guitane et Belloumi, je sais qu'ils n'ont pas joué, j'ai fait des choix. Tous les joueurs doivent se donner à fond dans leurs clubs et ils doivent comprendre au même temps qu'ils peuvent jouer en sélection dans des postes qui ne sont pas forcément les siens. Tout le monde a voulu montrer qu'ils méritaient leurs places.
Amoura est sorti sur blessure, il a reçu un gros coup, j'espère qu'il n'a rien de grave. Pour ce qui est de Benzia, il a réalisé un match fantastique et il a été récompensé par ce magnifique but, il s'en rappellera sûrement pendant longtemps. Il a beaucoup alterné avec Brahimi sur le terrain et je ne m'attendais pas à ce niveau des deux joueurs. Enfin, les deux gardiens ont montré de belles choses et un bon niveau durant ce stage. Nous allons analyser ça prochainement pour faire le meilleur choix».
Hugo Broos (sélectionneur de l’Afrique du Sud) :
«Un très beau match»
«Nous avons assisté à un très beau match avec beaucoup de buts. Je suis très content de mon équipe, notamment sur le plan offensif, nous avons pu créer beaucoup de problèmes à l'équipe d'Algérie. La sélection algérienne a fourni un grand match ce soir. C'est une équipe forte avec beaucoup de qualités. Si cette équipe a joué de la même façon à la dernière CAN-2023 (reportée à 2024) en Côte d'Ivoire, elle aurait évitée l'élimination au premier tour. Nous avons abordé ce tournoi amoindris par l'absence de cinq éléments pour diverses blessures, j'ai pu voir à l'œuvre de nouveaux joueurs, je n'ai pas de souci pour l'avenir de cette équipe, je pense qu'on sera encore plus forts. Nous avons fait beaucoup de progrès en un an, ce qui nous a permis d'ailleurs de terminer troisièmes à la dernière CAN. Maintenant, le prochain objectif est de se qualifier à la prochaine Coupe du monde 2026. Concernant mon avenir, je tiens à préciser qu'il n y a aucun contact avec la fédération tunisienne. Si je crois les médias tunisiens, je suis un candidat. Mon contrat avec la SAFA (Fédération sud-africaine, ndlr) expire en 2026, si je quitte l'Afrique du Sud, c'est à la fédération de décider, pour moi ce n'est que des rumeurs. Enfin, le tournoi FIFA Series-2024 a été une belle opportunité de pouvoir jouer deux matchs de haut niveau, ça été un bon test pour nous.»
Yassine Benzia :
«J’espère qu’on va monter en puissance»
«HamdoulilAllah, grâce à Dieu j'ai pu marquer ce soir. Le plus important est qu'on a pu revenir dans le match, nous sommes en train d'apprendre avec le nouveau coach, c'était un bon test face à une belle équipe sud-africaine qui a fait une belle CAN. J'espère qu'on va monter en puissance lors des prochains matchs. Je tiens à remercier nos supporters pour leur soutien, ma famille, et tous ceux qui nous ont poussé ce soir. On va encore travailler pour rendre fier et heureux le peuple algérien.»
Mohamed Amine Madani (défenseur/ Algérie) :
«J’estime avoir accompli ma mission»
«Je suis très content de ma première sélection. J'ai donné le meilleur de moi-même, j'estime que j'ai bien accompli ma mission sur le terrain grâce à Dieu. Nous avons affronté une belle équipe sud-africaine qui joue bien au football, en faisant sortir la balle par derrière. Nous avons appliqué les consignes du coach, je pense que nous avons maîtrisé l'adversaire. Le match était très disputé de part et d'autre avec beaucoup d'enseignements à tirer.»
